Ecologie et emploi : que nous disent les rapports existants ?
Tout notre système économique repose sur l’exploitation de ressources, naturelles comme humaines. La production, la consommation, et donc l’emploi, vont être considérablement impactés par la nécessaire « transition écologique ». Les rapports du GIEC sont clairs : les activités humaines ont un impact sur le dérèglement climatique et nous devons opérer un virage net pour enrayer les processus d’emballement en cours. Ainsi, les pouvoirs publics mettent en place des plans pour décarboner les filières les plus émettrices de CO2 (industrie, transports, énergie) afin de respecter l’objectif de neutralité carbone en 2050 inscrit dans loi énergie-climat de novembre 2019.
Mais quelles conséquences aura ce virage sur le travail ? À cette question, de nombreux rapports institutionnels tentent de répondre. À la lecture des travaux prospectifs menés par les agences institutionnelles (Observatoire national des emplois et métiers de l'économie verte [ONEMEV], France Stratégie, Ademe, etc.), il semblerait que l’approche quantitative soit privilégiée. On cherche à savoir combien d’emplois devraient être créés et combien seraient détruits, on cherche à identifier les secteurs d’activité les plus touchés et à définir les métiers dits « verts » ou « verdissants ». L’objectif est aussi d’identifier les nouvelles compétences à développer et les besoins en matière de formation pour pouvoir s’adapter à ce nouveau paradigme. Puisque l’on cherche à mesurer et à chiffrer, on regarde ce qui est chiffrable. Or, cette approche macro-économique nous semble comporter deux principales limites :
1. Cette analyse centrée sur la décarbonation semble circonscrire l’écologie à sa dimension climatique. Il s’agit de réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour préserver l’environnement. Par conséquent, les filières les plus émettrices de CO2 sont les plus scrutées : le BTP, l’énergie, les transports et l’agriculture (c’est d’ailleurs dans ces secteurs que se concentrent les métiers dits verts et verdissants) ; les métiers des services à la personne (l’éducation, la santé, l’action sociale) ou encore du commerce et de la culture sont relativement absents de ces considérations écologiques. Or, de nombreux travaux, notamment philosophiques et sociologiques, nous invitent à penser l’écologie sous une acception beaucoup plus globale : la priorité est aujourd'hui de prendre soin du vivant, c'est-à-dire de la planète et des liens sociaux.
2. Les rapports institutionnels se concentrent sur la notion d’emploi et parlent assez peu de « travail ». Lorsqu’il s’agit de quantifier, les notions d’emploi (activité déclarée et rémunérée dans le cadre d’un contrat) et de travail tendent à se confondre. Or, il semblerait que la crise écologique amène les salariés à questionner plus largement leur rapport au travail et à tout ce que celle-ci recouvre (contenu de l’activité, conditions de travail, sens du travail, place du travail dans la vie, sentiment d’appartenance, identité professionnelle, application des considérations écologiques en situation de travail, etc.). Les dimensions éthiques et sociologiques du travail sont peu abordées dans les publications actuelles liées à la transition écologique.
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