Sept pistes de réflexion et d’ouverture
> Assurer de bonnes ressources financières : la question de la rémunération du travail et du partage de la valeur doit se retrouver au cœur des débats au sein des organisations. Les actifs doivent pouvoir vivre dignement de leur travail. La transition écologique est aussi une question de justice sociale, or, on sait que les inégalités vont croissant.
Pour les entreprises : repenser les écarts de salaire au sein de l’organisation, définir un ratio maximal entre le plus petit et le plus gros salaire
> Repenser le partage du pouvoir et se former à prendre les décisions autrement : l’urgence écologique nous pousse à penser des systèmes de gouvernance multipartites où toutes les parties prenantes ont voix au chapitre (producteurs, bénéficiaires, partenaires) et où la rentabilité court-terme ne prime pas sur le long-terme.
Pour les entreprises : se poser la question du statut juridique de la structure, promouvoir des pratiques de management basées sur la coopération, se former aux méthodes de l’intelligence collective.
> Faire en sorte que les travailleurs puissent se réapproprier leur temps. Qu’il s’agisse des métiers où la disponibilité horaire est extensive (métiers du care, de l'hôtellerie-restauration ou encore de la vente) ou des métiers dans lesquels la frontière entre les sphères privées et professionnelles s’estompe, la question du temps de travail doit être débattue de façon concertée. L’intensification du travail physique et/ou du travail psychique (charge mentale) concerne de plus en plus d’actifs, la crise écologique doit être l’opportunité de repenser notre rapport au temps.
Pour les entreprises : mener une réflexion sur la charge de travail et des rythmes de travail. Par exemple :
supprimer les « emplois du temps à trous » dans les métiers des services à la personnes et mutualiser les emplois en se basant sur les compétences des individus ;
dans les lieux de travail fixes (usines, magasins, entrepôts), négocier les horaires d’ouverture et de prise de poste avec les salariés concernés ;
mener des expérimentations sur la semaine de quatre jours
> Penser le contenu des métiers en repartant de l’activité réelle, et en s’imposant de préserver les ressources matérielles et environnementales : travailler les postures et les gestes métiers à partir de qui l’on est et ce que l’on a.
Pour les entreprises :
mener une analyse fine du cycle de vie des produits pour réaliser des économies de ressources (matières premières, eau, énergie), pour trier et valoriser les déchets, pour mener des politiques d’achats responsables ;
sortir d’une logique de sur-production, produire moins mais mieux. Expérimenter des logiques de production « à la demande » plutôt que d’adopter une politique de l’offre ;
négocier les périmètres de l’activité avec les travailleurs directement concernés afin de s’assurer que les situations de travail ne soient pas un verrou dans les dynamiques de transformation.
> Cesser d’opposer les métiers de conception et d'exécution, entre le travail manuel et le travail intellectuel. Pour mener la transition écologique, nous aurons besoin des savoir-faire des professionnels de toute la chaîne de valeur. Ainsi, si l’on veut que les démarches de transformation des modèles de production aboutissent, on ne peut se limiter à des démarches ponctuelles de consultation. Il s’agit d’associer toutes les typologies de métiers à la discussion sur l’évolution des normes et pratiques professionnelles à l’heure de la transition écologique.
Pour les entreprises :
organiser des espaces de discussion sur le travail (EDT), à l’échelle d’une équipe, afin que les salariés se réapproprient le contenu de leur travail, qu’ils puissent discuter de l’organisation et des critères d’évaluation de la qualité du travail (objectifs, moyens, outils…) ;
s’assurer que les grandes familles d’emploi soient représentées dans les instances de représentation du personnel afin que les projets stratégiques soient négociés en prenant en considération l’ensemble des situations de travail.
> Faire du travail le lieu de l’apprentissage en continu. Le fait de développer ses compétences est une des dimensions qui confère du sens au travail, ainsi, les organisations ont la responsabilité de maintenir tous les employés – et non pas seulement les cadres – dans cette dynamique d’apprentissage et de formation continue.
Pour les entreprises et les OPCO :
organiser des formations liées aux métiers afin que tous les actifs fassent évoluer leurs pratiques et leurs manières de mobiliser leurs compétences au regard des enjeux écologiques ;
offrir aux salariés la possibilité de se former sur le domaine de leur choix, même si cela n’est pas directement lié à l’exercice de leur métier.
> Repenser la vision de la carrière professionnelle, sortir d’une vision réductrice selon laquelle une carrière « réussie » serait forcément une carrière linéaire, ascendante et sans pause.
Pour les entreprises :
offrir aux salariés la possibilité de prendre régulièrement des congés sabbatiques ;
permettre à tous les parents (pères, mères) de prendre des congés parentaux et les revaloriser financièrement ;
recruter des profils atypiques, ne pas associer le diplôme à la compétence et parier sur la formation continue.
[1] Les études montrent que ceux qui gagnent le plus sont aussi ceux qui polluent le plus. Dès lors, se poser la question des écarts de rémunérations n’est pas un enjeu moral mais bien un impératif écologique.
[2] Voir les résultats de l’expérimentation menée sur 3 300 salariés au Royaume-Uni : Teresa O’connell (2022), « Test de la semaine de 4 jours aux UK : les impressions des British », Welcome to the Jungle.
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